Le marchand et le génie


Sire, il y avait autrefois un marchand qui possédait de grands biens, tant en fonds de terre qu'en marchandises et en argent comptant. Un jour qu'une affaire d'importance l'appelait, il monta à cheval et partit avec une valise derrière lui, dans laquelle il avait mis une petite provision de biscuits et de dattes, parce qu'il avait un pays désert à passer, où il n'aurait pas trouvé de quoi vivre. Il arriva sans accident à l'endroit où il avait affaire, et, quand il eut terminé la chose qui l'y avait appelé, il remonta à cheval pour s'en retourner chez lui.
« Le quatrième jour de sa marche, affamé, il s'assit près d'une fontaine, après avoir tiré de sa valise quelques dattes et du biscuit. En mangeant les dattes, il en jetait les noyaux à droite et à gauche. Lorsqu'il eut achevé ce repas frugal, comme il était bon musulman, il se lava les mains, le visage et les pieds, et fit sa prière.
« Il était encore à genoux, quand il vit paraître un génie tout blanc de vieillesse et d'une grandeur énorme, qui, s'avançant jusqu'à lui le sabre à la main, lui dit d'un ton de voix terrible :
« Lève-toi, que je te tue avec ce sabre comme tu as tué mon fils. »
« Le marchand lui répondit en tremblant :
Comment pourrais-je avoir tué votre fils ? Je ne le connais point, et je ne l'ai jamais vu.
- Ne t'es-tu pas assis en arrivant ici ? répliqua le génie ; n'as-tu pas tiré des dattes de ta valise, et, en les mangeant, n'en as-tu pas jeté les noyaux à droite et à gauche ?
- Je ne puis le nier, répondit le marchand.
- Cela étant, reprit le génie, je te dis que tu as tué mon fils, et voici comment : dans le temps que tu jetais tes noyaux, mon fils passait ; il en a reçu un dans l'oeil, et il en est mort : c'est pourquoi il faut que je te tue.
- Ah Monseigneur pardon, s'écria le marchand. Je n'ai assurément pas tué votre fils ; et, quand cela serait, je ne l'aurais fait que fort innocemment : par conséquent, je vous supplie de me laisser la vie.
- Non, non, dit le génie, il faut que je te tue de même que tu as tué mon fils. »
A ces mots, il prit le marchand par le bras, le jeta la face contre terre, et leva le sabre pour lui couper la tête.
« Quand le marchand vit que le génie lui allait trancher la tête, il fit un grand cri, et lui dit :
« Arrêtez, de grâce ; ayez la bonté de m'accorder un délai : donnez-moi le temps d'aller dire adieu à ma femme et à mes enfants, et de leur partager mes biens par un testament que je n'ai pas encore fait ; je reviendrai aussitôt dans ce même lieu me soumettre à tout ce qu'il vous plaira d'ordonner de moi.
- Mais, dit le génie, si je t'accorde le délai que tu demandes, j'ai peur que tu ne reviennes pas.
- Si vous voulez m'en croire à mon serment, répondit le marchand, je jure par le Dieu du ciel et de la terre que je viendrai vous retrouver ici sans y manquer. Je vous promets que de demain en un an, sans faute, je me rendrai sous ces arbres, pour me remettre entre vos mains.» A ces paroles, le génie disparut.
« Le marchand, s'étant remis de sa frayeur, remonta à cheval et reprit son chemin. Quand il arriva chez lui, sa femme et ses enfants le reçurent avec une joie parfaite ; mais, au lieu de les embrasser de la même manière, il se mit à pleurer si amèrement qu'ils jugèrent bien qu'il lui était arrivé quelque chose d'extraordinaire.
« Nous nous réjouissions, disait-elle, de votre retour, et cependant vous nous alarmez tous par l'état où nous vous voyons.
- Hélas ! répondit le mari ; je n'ai plus qu'un an à vivre.»
Alors il leur raconta ce qui s'était passé entre lui et le génie, et leur apprit qu'il lui avait donné parole de retourner au bout de l'année recevoir la mort de sa main.
« Lorsqu'ils entendirent cette triste nouvelle, ils commencèrent tous à se désoler. La femme poussait des cris pitoyables ; les enfants faisaient retentir la maison de leurs gémissements ; et le père mêlait ses larmes à leurs plaintes.
« Dès le lendemain, le marchand songea à mettre ordre à ses affaires, et s'appliqua sur toutes choses à payer ses dettes. Il fit des présents à ses amis et de grandes aumônes aux pauvres, donna la liberté à ses esclaves, partagea ses biens entre ses enfants, et, en rendant à sa femme tout ce qui lui appartenait, il l'avantagea de tout ce qu'il put lui donner suivant les lois.
« Enfin l'année s'écoula, et il fallut partir. Il fit sa valise, où il mit le drap dans lequel il devait être enseveli ; mais, lorsqu'il voulut dire adieu à sa femme et à ses enfants, on n'a jamais vu une douleur plus vive.
« Mes enfants, leur dit-il, j'obéis à l'ordre de Dieu en me séparant de vous. Imitez-moi : soumettez-vous courageusement à cette nécessité, et songez que la destinée de l'homme est de mourir.»
Après avoir dit ces paroles, il partit, et arriva au même endroit où il avait vu le génie, le propre jour qu'il avait promis de s'y rendre. Il mit aussitôt pied à terre, et s'assit au bord de la fontaine, où il attendit le génie.
« Pendant qu'il languissait dans une si cruelle attente, un bon vieillard, qui menait une biche à l'attache, parut et s'approcha de lui. Ils se saluèrent l'un l'autre ; après quoi le vieillard lui dit :
« Mon frère, peut-on savoir de vous pourquoi vous êtes venu dans ce lieu désert ? »
« Le marchand lui conta son aventure. Le vieillard l'écouta avec étonnement.
« Voilà, s'écria-t-il, la chose du monde la plus surprenante ; et vous vous êtes lié par le serment le plus inviolable. Je veux être témoin de votre entrevue avec le génie. » Il s'assit près du marchand, et tandis qu'ils s'entretenaient tous deux, il arriva un autre vieillard suivi de deux chiens noirs. Il s'avança jusqu'à eux, et les salua en leur demandant ce qu'ils faisaient en cet endroit. Le vieillard qui conduisait la biche lui apprit l'aventure du marchand et du génie. Il ajouta qu'il était résolu de demeurer là pour voir ce qui en arriverait.
« Le second vieillard, trouvant aussi la chose digne de sa curiosité, prit la même résolution. Il s'assit auprès des autres et à peine se fut-il mêlé à leur conversation qu'il survint un troisième vieillard qui, s'adressant aux deux premiers, leur demanda pourquoi le marchand qui était avec eux paraissait si triste. On lui en dit le sujet, qui lui parut si extraordinaire qu'il souhaita aussi d'être témoin de ce qui se passerait entre le génie et le marchand. Pour cet effet, il se plaça parmi les autres.
« Ils aperçurent bientôt dans la campagne une vapeur épaisse, comme un tourbillon de poussière enlevé par le vent. Cette vapeur s'avança jusqu'à eux, et, se dissipant tout à coup, leur laissa voir le génie, qui, sans les saluer, s'approcha du marchand le sabre à la main et qui lui dit, le prenant par le bras :
« Lève-toi, que je te tue comme tu as tué mon fils. »
Le marchand et les trois vieillards effrayés se mirent à pleurer et à remplir l'air de cris...
« Quand le vieillard qui conduisait la biche vit que le génie s'était saisi du marchand et l'allait tuer impitoyablement, il se jeta aux pieds de ce monstre, et, les lui baisant :
« Prince des génies, lui dit-il, je vous supplie très humblement de suspendre votre colère et de me faire la grâce de m'écouter. Je vais vous raconter mon histoire et celle de cette biche que vous voyez ; mais, si vous la trouvez plus merveilleuse et plus surprenante que l'aventure de ce marchand à qui vous voulez ôter la vie, puis-je espérer que vous voudrez bien remettre à ce pauvre malheureux le tiers de son crime ? »
Le génie fut quelque temps à se consulter là-dessus ; mais enfin il répondit :
« Hé bien, voyons, j'y consens.»



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Histoire du premier vieillard et de la biche


Je vais donc, reprit le vieillard, commencer mon récit ; écoutez-moi, je vous prie, avec attention. Cette biche que vous voyez est ma cousine et de plus ma femme.
« Nous avons vécu ensemble trente années sans avoir eu d'enfants ; mais sa stérilité ne m'a point empêché d'avoir pour elle beaucoup de complaisance et d'amitié. Le seul désir d'avoir des enfants me fit acheter une esclave, dont j'eus un fils qui promettait infiniment. Ma femme en conçut de la jalousie, prit en aversion la mère et l'enfant, et cacha si bien ses sentiments que je ne les connus que trop tard.
« Cependant mon fils croissait, et il avait déjà dix ans, lorsque je fus obligé de faire un voyage. Avant mon départ, je recommandai à ma femme, dont je ne me défiais point, l'esclave et son fils, et je la priai d'en avoir soin pendant mon absence, qui dura une année entière. Elle profita de ce temps-là pour contenter sa haine. Elle s'attacha à la magie, et, quand elle sut assez de cet art diabolique pour exécuter l'horrible dessein qu'elle méditait, la scélérate mena mon fils dans un lieu écarté. Là, par ses enchantements, elle le changea en veau, et le donna à mon fermier, avec ordre de le nourrir comme un veau, disait-elle, qu'elle avait acheté. Elle ne borna point sa fureur à cette action abominable ; elle changea l'esclave en vache, et la donna aussi à mon fermier.
« À mon retour, je lui demandai des nouvelles de la mère et de l'enfant.
« Votre esclave est morte, me dit-elle et, pour votre fils, il y a deux mois que je ne J'ai vu et que je ne sais ce qu'il est devenu » Je fus touché de la mort de l'esclave ; mais, comme mon fils n'avait fait que disparaître, je me flattai que je pourrais le revoir bientôt. Néanmoins huit mois se passèrent sans qu'il revînt, et je n'en avais aucune nouvelle, lorsque la fête du grand Baïram arriva. Pour la célébrer, je mandai à mon fermier de m'amener une vache des plus grasses pour en faire un sacrifice. Il n'y manqua pas. La vache qu'il m'amena était l'esclave elle-même, la malheureuse mère de mon fils. Je la liai ; mais, dans le moment que je me préparais à la sacrifier, elle se mit à faire des beuglements pitoyables, et je m'aperçus qu'il coulait de ses yeux des ruisseaux de larmes. Cela me parut assez extraordinaire ; et me sentant, malgré moi, saisi d'un mouvement de pitié, je ne pus me résoudre à la frapper, j'ordonnai à mon fermier de s'en aller prendre une autre.
« Ma femme, qui était présente, frémit de ma compassion :
« Que faites-vous, mon mari ? s'écria-t-elle. immolez cette vache. » Par complaisance pour ma femme, je m'approchai de la vache ; et, j'allais porter le coup mortel, quand la victime, redoublant ses pleurs et ses beuglements, me désarma une seconde fois. Alors je mis le maillet entre les mains du fermier en lui disant :
« Prenez, et sacrifiez-la vous-même ; ses beuglements et ses larmes me fendent le coeur.»
« Le fermier, moins pitoyable que moi, la sacrifia. Mais, en l'écorchant, il se trouva qu'elle n'avait que les os, quoiqu'elle nous eût paru très grasse.
« Prenez-la pour vous, dis-je au fermier ; et, si vous avez un veau bien gras, amenez-le-moi à sa place. »
Peu de temps après qu'il eut fait enlever la vache de devant mes yeux, je le vis arriver avec un veau fort gras. Quoique j'ignorasse que ce veau fût mon fils, je ne laissai pas de sentir émouvoir mes entrailles à sa vue. De son côté, dès qu'il m'aperçut, il fit un si grand effort pour venir à moi qu'il en rompit sa corde. Il se jeta à mes pieds, la tête contre terre, comme s'il eût voulu exciter ma compassion et me conjurer de n'avoir pas la cruauté de lui ôter la vie.
« Je fus encore plus surpris et plus touché de cette action que je ne l'avais été des pleurs de la vache. Je sentis une tendre pitié qui m'intéressa pour lui.
« Allez, dis-je, ramenez ce veau chez vous ; ayez-en un grand soin, et, à sa place, amenez-en un autre incessamment. »
Dès que ma femme m'entendit parler ainsi, elle ne manqua pas de s'écrier encore :
« Que faites-vous, mon mari ? croyez-moi, ne sacrifiez pas un autre veau que celui-là.

- Ma femme, lui répondis-je, je n'immolerai pas celui-ci ; je veux lui faire grâce, je vous prie de ne vous y point opposer.»
Elle n'eut garde, la méchante femme, de se rendre à ma prière ; elle haïssait trop mon fils pour consentir que je le sauvasse. Elle m'en demanda le sacrifice avec tant d'opiniâtreté que je fus obligé de le lui accorder. Je liai le veau, et, prenant le couteau funeste, j'allais l'enfoncer dans la gorge de mon fils, lorsque, tournant vers moi languissamment ses yeux baignés de pleurs, il m'attendrit à un point que je n'eus pas la force de l'immoler. Je laissai tomber le couteau, et je dis à ma femme que je voulais absolument tuer un autre veau que celui-là. Je demeurai ferme, et lui promis seulement, pour l'apaiser, que le le sacrifierais au Baïram de l'année prochaine.
« Le lendemain matin, mon fermier demanda à me parier en particulier.
« Je viens, me dit-il, vous apprendre une nouvelle. J'ai une fille qui a quelque connaissance de la magie. Hier, comme je ramenais au logis le veau, je remarquai qu'elle rit en le voyant, et qu'un moment après elle se mit à pleurer, je lui demandai pourquoi.
« Mon père, me répondit-elle, ce veau que vous ramenez est le fils de notre maître. J'ai ri de joie de le voir encore vivant, et j'ai pleuré en me souvenant du sacrifice qu'on fit hier de sa mère qui était changée en vache. Ces deux métamorphoses ont été faites par les enchantements de la femme de notre maître, laquelle haïssait la mère et l'enfant.»
« À ces paroles, ô génie, continua le vieillard, je vous laisse à juger quelle fut ma surprise ! je partis sur-le-champ avec mon fermier pour parler moi-même à sa fille.
« Lorsque la fille du fermier arriva, je lui dis :
« Ma bonne fille, pouvez-vous rendre à mon fils sa première forme ?
- Oui, le le puis, me répondit-elle.
- Ah ! si vous en venez à bout, repris-je, je vous fais maîtresse de tous mes biens.»
Alors elle me répartit en souriant :
« Vous êtes notre maître, et je sais trop bien ce que je vous dois ; mais le vous avertis que je ne puis remettre votre fils dans son premier état qu'à deux conditions : la première, que vous me le donnerez pour époux, et la seconde qu'il me sera permis de punir la personne qui l'a changé en veau.
- Pour la première condition, lui dis-je, je l'accepte de bon coeur ; je dis plus, je vous promets de vous donner beaucoup de bien pour vous en particulier. Pour la condition qui regarde ma femme, je veux bien l'accepter encore, je vous l'abandonne, faites-en ce qu'il vous plaira ; je vous prie seulement de ne lui pas ôter la vie.
- Je vais donc, répliqua-t-elle, la traiter de la même manière qu'elle a traité votre fils.»
« Alors cette fille prit un vase plein d'eau, prononça dessus des paroles que je n'entendis pas, et, s'adressant au veau :
0 veau ! dit-elle, si tu as été créé par le tout-puissant et souverain maître du monde tel que tu parais en ce moment, demeure sous cette forme ; mais, si tu es homme et que tu sois changé en veau par enchantement, reprends ta figure naturelle par la permission du souverain Créateur. En achevant ces mots, elle jeta l'eau sur lui, et à l'instant il reprit sa première forme.
« Mon fils, mon cher fils ! m'écriai-je, c'est Dieu qui nous a envoyé cette jeune fille pour détruire l'horrible charme dont vous étiez environné. Je ne doute pas que, par reconnaissance, vous ne vouliez bien la prendre pour femme.»
Il y consentit avec joie ; mais, avant qu'ils se mariassent, la jeune fille changea ma femme en biche, et c'est elle que vous voyez ici.
« Depuis ce temps-là, mon fils est devenu veuf et est allé voyager. Comme il y a plusieurs années que je n'ai eu de ses nouvelles, je me suis mis en chemin pour tâcher d'en apprendre et, n'ayant voulu confier à personne le soin de ma femme pendant que je serais en quête de lui, j'ai jugé à propos de la mener partout avec moi. Voilà donc mon histoire et celle de cette biche.
N'est-elle pas des plus surprenantes et des plus merveilleuses ?
- J'en demeure d'accord, dit le génie, et, en sa faveur, je t'accorde le tiers de la grâce de ce marchand.»
Quand le premier vieillard, Sire, continua la sultane, eut achevé son histoire, le second, qui conduisait les deux chiens noirs, s'adressa au génie et lui dit :
« Je vais vous raconter ce qui m'est arrivé, à moi et à ces deux chiens noirs que voici, et le suis sûr que vous trouverez mon histoire encore plus étonnante que celle que vous venez d'entendre. Mais quand je vous l'aurai contée, m'accorderez-vous le second tiers de la grâce de ce marchand ?
- Oui, répondit le génie, pourvu que ton histoire surpasse celle de la biche.»
Après ce consentement, le second vieillard commença de cette manière :



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Histoire du second vieillard et des deux chiens noirs



Grand prince des génies, vous saurez que nous sommes trois frères, ces deux chiens noirs que vous voyez, et moi qui suis le troisième. Notre père nous avait laissé en mourant à chacun mille sequins. Avec cette somme, nous nous fîmes tous trois marchands. Peu de temps après que nous eûmes ouvert boutique, mon frère aîné résolut de voyager et d'aller négocier dans les pays étrangers. Il vendit tout son fonds et en acheta des marchandises propres au négoce qu'il voulait faire.
« Il partit, et fut absent une année entière. Au bout de ce temps-là, un pauvre qui me parut demander l'aumône se présenta à ma boutique. le lui dis :
« Dieu vous assiste !
- Dieu vous assiste aussi ! me répondit-il : est-il possible que vous ne me reconnaissiez pas ? »
Alors, l'envisageant avec attention, je le reconnus.
« Ah ! mon frère ! m'écriai-je en l'embrassant, comment vous aurais-je pu reconnaître en cet état ? »
« Je fis fermer aussitôt ma boutique, et, abandonnant tout autre soin, je le menai au bain, et lui donnai les plus beaux habits de ma garde-robe. J'examinai mes registres de vente et d'achat, et, trouvant que j'avais doublé mon fonds, je lui en donnai la moitié.
« Avec cela, mon frère, lui dis-je, vous pourrez oublier la perte que vous avez faite. »
Il accepta les mille sequins avec joie, rétablit ses affaires, et nous vécûmes ensemble comme nous avions vécu auparavant.
« Quelque temps après, mon second frère, qui est l'autre de ces deux chiens, voulut aussi vendre son fonds. De l'argent qu'il en fit il acheta des marchandises propres au négoce étranger qu'il voulait entreprendre. Il se joignit à une caravane et partit. Il revint au bout de l'an dans le même état que son frère aîné, je le fis habiller, et, comme j'avais encore mille sequins par-dessus mon fonds, je les lui donnai. Il releva boutique et continua d'exercer sa profession.
« Un jour, mes deux frères vinrent me trouver pour me proposer de faire un voyage et d'aller trafiquer avec eux. Je rejetai d'abord leur proposition.
« Vous avez voyagé, leur dis-je : qu'y avez-vous gagné ? Qui m'assurera que je serai plus heureux que vous ? »
Mais ils revinrent tant de fois à la charge qu'après avoir pendant cinq ans résisté constamment à leurs sollicitations, je m'y rendis enfin. Mais, quand il fallut faire les préparatifs du voyage, et qu'il fut question d'acheter les marchandises dont nous avions besoin, il se trouva qu'il ne leur restait rien des mille sequins que je leur avait donnés à chacun. Je ne leur en fis pas le moindre reproche. Au contraire, comme mon fonds était de six mille sequins, j'en partageai la moitié avec eux, en leur disant :
« Mes frères, il faut risquer ces trois mille sequins seulement ; afin que, si notre voyage n'est pas plus heureux que ceux que vous avez déjà faits, nous ayons de quoi nous en consoler et reprendre notre ancienne profession.»
Je donnai donc mille sequins à chacun, j'en gardai autant pour moi. Nous achetâmes des marchandises, et, après les avoir embarquées sur un vaisseau, nous fîmes mettre à la voile avec un vent favorable. Après un mois de navigation, nous arrivâmes heureusement à un port de mer, où nous débarquâmes et fîmes un très grand débit de nos marchandises. Moi surtout, je vendis si bien les miennes que je gagnai dix pour un. Nous achetâmes des marchandises du pays, pour les négocier au nôtre.
« Dans le temps que nous étions prêts à nous rembarquer, je rencontrai sur le bord de la mer une dame assez bien faite, mais fort pauvrement habillée. Elle m'aborda, me baisa la main, et me pria, avec les dernières instances, de la prendre pour femme et de l'embarquer avec moi. Je fis difficulté de lui accorder ce qu'elle demandait ! Mais elle me dit tant de choses pour me persuader, que je me laissai vaincre. Je lui fis faire des habits propres ; et, après l'avoir épousée, nous mîmes à la voile.
« Pendant notre navigation, le trouvai de si belles qualités dans la femme que je venais de prendre que je l'aimais tous les jours de plus en plus. Cependant mes deux frères, qui étaient jaloux de ma prospérité, me portaient envie. Une nuit, dans le temps que ma femme et moi nous dormions, ils nous jetèrent à la mer.


« Ma femme était fée, et par conséquent génie ; vous jugez bien qu'elle ne se noya pas. Pour moi, il est certain que je serais mort sans son secours ; mais je fus à peine tombé dans l'eau qu'elle m'enleva et me transporta dans une île. Quand il fut jour, la fée me dit :
« Vous voyez, mon mari, qu'en vous sauvant la vie, je ne vous ai pas mal récompensé du bien que vous m'avez fait. Me trouvant sur le bord de la mer lorsque vous alliez vous embarquer, je me sentis une forte inclination pour vous. Je voulus éprouver la bonté de votre coeur ; je me présentai devant vous déguisée comme vous m'avez vue. Vous en avez usé avec moi généreusement : je suis ravie d'avoir trouvé l'occasion de vous en marquer ma reconnaissance. Mais je suis irritée contre vos frères.»
« J'écoutai avec admiration le discours de la fée ; je la remerciai.
« Mais, Madame, lui dis-le, pour ce qui est de mes frères, je vous supplie de leur pardonner. Je ne suis pas assez cruel pour vouloir leur perte.»
Je lui racontai ce que j'avais fait pour l'un et l'autre et, mon récit augmentant son indignation contre eux :
« Il faut, s'écria-t-elle, que je vole tout à l'heure après ces traîtres et ces ingrats. Je vais submerger leur vaisseau et les précipiter dans le fond de la mer.
- Non, ma belle dame, repris-je ; au nom de Dieu, songez que ce sont mes frères. »
« J'apaisai la fée par ces paroles ; et elle me transporta en un instant de l'île où nous étions sur le toit de mon logis, et elle disparut un moment après. Je descendis, j'ouvris les portes, et je déterrai les trois mille sequins que j'avais cachés. J'allai ensuite à la place où était ma boutique ; je l'ouvris, et je reçus des marchands mes voisins des compliments sur mon retour. Quand je rentrai chez moi, j'aperçus ces deux chiens noirs, qui vinrent m'aborder d'un air soumis. Je ne savais ce que cela signifiait ; mais la fée, qui parut bientôt, m'en éclaircit.
« Mon mari, me dit-elle, ces deux chiens chez vous sont vos deux frères.»
Je frémis à ces mots, et je lui demandai par quelle puissance ils se trouvaient en cet état.
« C'est moi qui les y ai mis, me répondit-elle ; le les ai condamnés à demeurer dix ans sous cette forme ; leur perfidie ne les rend que trop dignes de cette pénitence.» Après, elle disparut.
« Présentement que les dix années sont accomplies, je suis en chemin pour l'aller chercher ; et, comme en passant par ici j'ai rencontré ce marchand et le bon vieillard qui mène sa biche, je me suis arrêté avec eux. Voilà quelle est mon histoire, ô prince des génies ! ne vous paraît-elle pas des plus extraordinaires ?
- J'en conviens, répondit le génie, et je remets aussi en sa faveur le second tiers du crime dont ce marchand est coupable envers moi.»
Aussitôt que le second vieillard eut achevé son histoire, le troisième prit la parole, et fit au génie la même demande que les deux premiers, c'est-à-dire de remettre au marchand le troisième tiers de son crime, supposé que l'histoire qu'il avait à lui raconter surpassât les deux autres. Le génie lui fit la même promesse qu'aux autres. Je ne connais point l'histoire du troisième vieillard, mais je sais qu'elle se trouva si fort au-dessus des deux précédentes, que le génie en fut étonné.
« Je t'accorde le dernier tiers de la grâce du marchand ; il doit bien vous remercier tous trois de l'avoir tiré d'intrigue par vos histoires ; sans vous il ne serait plus au monde.»
En achevant ces mots, il disparut, au grand contentement de la compagnie. Le marchand ne manqua pas de rendre à ses trois libérateurs toutes les grâces qu'il leur devait. Ils se réjouirent avec lui de le voir hors de péril ; après quoi chacun reprit son chemin. Le marchand s'en retourna auprès de sa femme et de ses enfants, et passa tranquillement avec eux le reste de ses jours.


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Histoire du pêcheur



Il y avait autrefois un pêcheur fort âgé et si pauvre qu'à peine pouvait-il gagner de quoi faire subsister sa femme et trois enfants, dont sa famille était composée. Il allait tous les jours à la pêche de grand matin ; et, chaque jour, il s'était fait une loi de ne jeter ses filets que quatre fois seulement.
« Il partit un matin au clair de la lune, et se rendit au bord de la mer. Il se déshabilla, et jeta ses filets, et, comme il les tirait vers le rivage, il sentit d'abord de la résistance ; il crut avoir fait une bonne pêche, et il s'en réjouissait déjà en lui-même. Mais un moment après, s'apercevant qu'au lieu de poisson il n'y avait dans ses filets que la carcasse d'un âne, il en eut beaucoup de chagrin...
« Quand le pêcheur, affligé d'avoir fait une si mauvaise pêche, eut raccommodé ses filets que la carcasse de l'âne avait rompus en plusieurs endroits, il les jeta une seconde fois. En les tirant, il sentit encore beaucoup de résistance ; ce qui lui fit croire qu'ils étaient remplis de poisson ; mais il n'y trouva qu'un grand panier plein de gravier et de fange. Il en fut dans une extrême affliction.
« O fortune ! s'écria-t-il d'une voix pitoyable, cesse d'être en colère contre moi, et ne persécute point un malheureux qui te prie de l'épargner ! Je n'ai pas d'autre métier que celui-ci pour subsister ; et, malgré tous les soins que j'y apporte, je puis à peine fournir aux plus pressants besoins de ma famille. »
« Il jeta brusquement le panier, et, après avoir bien lavé ses filets que la fange avait gâtés, il les jeta pour la troisième fois. Mais il n'amena que des pierres, des coquilles et de l'ordure.
On ne saurait exprimer quel fut son désespoir ; peu s'en fallut qu'il ne perdît l'esprit. Cependant, comme le jour commençait à paraître, il n'oublia pas de faire sa prière en bon musulman ; ensuite il ajouta celle-ci : Seigneur, vous savez que je ne jette mes filets que quatre fois chaque jour. Il ne m'en reste plus qu'une ; je vous supplie de me rendre la mer favorable, comme vous l'avez rendue à Moïse.
« Le pêcheur, ayant fini cette prière, jeta ses filets pour la quatrième fois. Quand il jugea qu'il devait y avoir du poisson, il les tira comme auparavant avec assez de peine. Il y trouva un vase de cuivre jaune qui était fermé et scellé de plomb, avec l'empreinte d'un sceau. Cela le réjouit.
« Je le vendrai au fondeur, disait-il, et, de l'argent que j'en, ferai, j'en achèterai une mesure de blé, »
« Il examina le vase de tous côtés ; il le secoua, pour voir ce qui était dedans. Il prit son couteau, et, avec un peu de peine, il l'ouvrit. Il le posa devant lui, et, pendant qu'il le considérait attentivement, il en sortit une fumée fort épaisse qui l'obligea de reculer deux ou trois pas en arrière. Cette fumée s'éleva jusqu'aux nues, et, s'étendant sur la mer et sur le rivage, forma un gros brouillard : spectacle qui causa, comme on peut se l'imaginer, un étonnement extraordinaire au pêcheur. Lorsque la fumée fut toute hors du vase, elle se réunit et devint un corps solide, dont il se forma un génie deux fois aussi haut que le plus grand de tous les géants. A l'aspect d'un monstre d'une grandeur si démesurée, le pêcheur voulut prendre la fuite ; mais il se trouva si troublé et si effrayé qu'il ne put marcher.


« Salomon, s'écria d'abord le génie, Salomon, grand prophète de Dieu, pardon, pardon ! Jamais je ne m'opposerai à vos volontés. J'obéirai à tous vos commandements... »
« Le pêcheur n'eut pas sitôt entendu les paroles que le génie avait prononcées qu'il se rassura et lui dit :
« Esprit superbe, que dites-vous ? Il y a plus de dix-huit cents ans que Salomon, le prophète de Dieu, est mort, et nous sommes présentement à la fin des siècles. Apprenez-moi votre histoire et pour quel sujet vous étiez renfermé dans ce vase. »
« A ce discours, le génie, regardant le pêcheur d'un air fier, lui répondit :
« Parle-moi plus civilement ; tu es bien hardi de m'appeler esprit superbe.
- Hé bien, repartit le pêcheur, vous parlerai-je avec plus de civilité en vous appelant hibou du bonheur ?
- Je te dis, repartit le génie, de me parler civilement avant que je te tue.
- Hé ! pourquoi me tueriez-vous ? répliqua le pêcheur. Je viens de vous mettre en liberté ; l'avez-vous déjà oublié ?
- Non, je m'en souviens, repartit le génie ; mais cela ne m'empêchera pas de te faite mourir ; et je n'ai qu'une seule grâce à t'accorder.
- Et quelle est cette grâce ? dit le pêcheur.
- C'est, répondit le génie, de te laisser choisir de quelle manière tu veux que je te tue.
- Mais en quoi vous ai-je offensé ? reprit le pêcheur. Est-ce ainsi que vous voulez me récompenser du bien que je vous ai fait ?
- Je suis un de ces esprits rebelles qui se sont opposés à la volonté de Dieu. Tous les autres génies reconnurent le grand Salomon, et se soumirent à lui. Je refusai hautement de lui obéir. Pour me punir, il m'enferma dans ce vase de cuivre et mit le vase entre les mains d'un des génies qui lui obéissaient, avec ordre de me jeter à la mer ; ce qui fut exécuté à mon grand regret. Durant le premier siècle de ma prison, je jurai que, si que qu'un m'en délivrait avant les cent ans achevés, je le rendrais riche, même après sa mort. Mais le siècle s'écoula, et personne ne me rendit ce bon office. Pendant le second siècle, je fis serment d'ouvrir tous les trésors de la terre à quiconque me mettrait en liberté ; mais je n'en fus pas plus heureux. Dans le troisième, je me promis de faire puissant monarque mon libérateur, d'être toujours près de lui en esprit, et de lui accorder chaque jour trois demandes, de quelque nature qu'elles pussent être ; mais ce siècle se passa comme les deux autres, et je demeurai toujours dans le même état. Enfin, chagrin, ou plutôt enragé de me voir prisonnier si longtemps, je jurai que, si quelqu'un me délivrait dans la suite, je le tuerais impitoyablement et ne lui accorderais point d'autre grâce que de lui laisser le choix du genre de mort dont il voudrait que je le fisse mourir. C'est pourquoi, puisque tu es venu ici aujourd'hui et que tu m'as délivré, choisis comment tu veux que je te tue. »
« Ce discours affligea fort le pêcheur.
« Je suis bien malheureux, s'écria-t-il, d'être venu en cet endroit rendre un si grand service à un ingrat. Considérez, de grâce, votre injustice, et révoquez un serment si peu raisonnable. Pardonnez-moi, Dieu vous pardonnera de même. Si vous me donnez généreusement la vie, il vous mettra à couvert de tous les attentats qui se formeront contre vos jours.
- Non, ta mort est certaine, dit le génie ; choisis seulement de quelle sorte tu veux que je te fasse mourir. »
Le pêcheur, le voyant dans la résolution de le tuer, en eût une douleur extrême, non pas tant pour l'amour de lui qu'à cause de ses trois enfants dont il plaignait la misère où ils allaient être réduits par sa mort. Il tâcha encore d'apaiser le génie.
« Hélas ! reprit-il, daignez avoir pitié de moi en considération de ce que j'ai fait pour vous.
- Je te l'ai déjà dit, repartit le génie, c'est justement pour cette raison que je suis obligé de t'ôter la vie.
- Cela est étrange, répliqua le pêcheur, que vous vouliez absolument rendre le mal pour le bien. Le proverbe dit que qui fait du bien à celui qui ne le mérite pas en est toujours mal payé. Je croyais, je l'avoue, que cela était faux : car, en effet, rien ne choque davantage la raison et les droits de la société ; néanmoins j'éprouve cruellement que cela n'est que trop véritable.
- Ne perdons pas de temps, interrompit le génie ; tous tes raisonnements ne sauraient me détourner de mon dessein. Hâte-toi de dire comment tu souhaites que le te tue. »
« La nécessité donne de l'esprit. Le pêcheur s'avisa d'un stratagème.
« Puisque je ne saurais éviter la mort, dit-il au génie, je me soumets donc à la volonté de Dieu. Mais, avant que je choisisse un genre de mort, je vous conjure par le grand nom de Dieu qui était gravé sur le sceau du prophète Salomon, fils de David, de me dire la vérité sur une question que j'ai à vous faire. »
« Quand le génie vit qu'on lui faisait une adjuration qui le contraignait de répondre positivement, il trembla en lui-même, et dit au pêcheur :
« Demande-moi ce que tu voudras, et hâte-toi ... »
« Le génie, ayant promis de dire la vérité, le pêcheur lui dit :
« Je voudrais savoir si effectivement vous étiez dans ce vase ; oseriez-vous en jurer par le grand nom de Dieu ?
- Oui, répondit le génie, je jure par ce grand nom que j'y étais, et cela est très véritable.
- En bonne foi, répliqua le pêcheur, je ne puis vous croire. Ce vase ne pourrait pas seulement contenir un de vos pieds : comment se peut-il que votre corps y ait été renfermé tout entier ?
- Je te jure pourtant, repartit le génie, que j'y étais tel que tu me vois. Est-ce que tu ne me crois pas, après le grand serment que j'ai fait ?
- Non vraiment, dit le pêcheur, et je ne vous croirai point, à moins que vous ne me fassiez voir la chose. »
« Alors il se fit une dissolution du corps du génie, qui, se changeant en fumée, s'étendit comme auparavant sur la mer et sur le rivage, et qui, se rassemblant ensuite, commença de rentrer dans le vase, et continua de même par une succession lente et égale, jusqu'à ce qu'il n'en restât plus rien au dehors.
Aussitôt il en sortit une voix qui dit au pêcheur :
« Hé bien, incrédule pêcheur, me voici dans le vase ; me crois-tu présentement ? »
« Le pêcheur, au lieu de répondre au génie, prit le couvercle de plomb, et, ayant fermé promptement le vase :
« Génie, lui cria-t-il, demande-moi grâce à ton tour, et choisis de quelle mort tu veux que je te fasse mourir. Mais non, il vaut mieux que je te rejette à la mer, dans le même endroit d'où je t'ai tiré, puis je ferai bâtir une maison sur ce rivage, où je demeurerai, pour avertir tous les pêcheurs qui viendront y jeter leurs filets de bien prendre garde de repêcher un méchant génie comme toi, qui as fait serment de tuer celui qui te mettra en liberté.»
« A ces paroles offensantes, le génie irrité fit tous ses efforts pour sortir du vase ; mais c'est ce qui ne lui fut pas possible, car l'empreinte du sceau du prophète Salomon, fils de David, l'en empêchait. Ainsi, voyant que le pêcheur avait alors l'avantage sur lui, il prit le parti de dissimuler sa colère.
« Pêcheur, lui dit-il d'un ton radouci, garde-toi bien de faire ce que tu dis. Ce que j'en ai fait n'a été que par plaisanterie, et tu ne dois pas prendre la chose sérieusement.
- 0 génie ! répondit le pêcheur, toi qui étais, il n'y a qu'un moment, le plus grand, et qui es à l'heure qu'il est le plus petit de tous les génies, apprends que tes artificieux discours ne te serviront de rien. Tu retourneras à la mer. Si tu y as demeuré tout le temps que tu m'as dit, tu pourras bien y demeurer jusqu'au jour du jugement. Je t'ai prié, au nom de Dieu, de ne me pas ôter la vie, tu as rejeté mes prières ; je dois te rendre la pareille.»
« Le génie n'épargna rien pour tâcher de toucher le pêcheur.
« Ouvre le vase, lui dit-il, donne-moi la liberté, je t'en supplie ; je te promets que tu seras content de moi.
- Tu n'es qu'un traître, repartit le pêcheur. Je mériterais de perdre la vie si j'avais l'imprudence de me fier à toi.»


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