Le gascon.
Je soupçonne
fort une histoire,
Quand le héros en est l'auteur.
L'amour-propre et la vaine gloire
Rendent souvent l'homme vanteur.
On fait toujours si bien son compte,
Qu'on tire de l'honneur de tout ce qu'on raconte.
A ce propos,
un Gascon, l'autre jour,
A table, au cabaret, avec un camarade,
De gasconnade en gasconnade,
Tomba sur ses exploits d'amour.
Dieu sait si là-dessus il en avoit à dire !
Une grosse servante, à quatre pas de là,
Prêtoit l'oreille à tout cela,
Et faisoit de son mieux pour s'empêcher de rire.
A l'entendre conter, il n'étoit, dans Paris,
De Chloris
Dont il ne connut la ruelle,
Dont il n'eût eu quelques faveurs ;
Son air étoit le trébuchet des coeurs.
Il aimoit celle-là, parce qu'elle étoit belle ;
Celle-ci payoit ses douceurs :
Il avoit chaque jour des garnitures d'elle ;
De plus, il étoit fort heureux ;
Il n'étoit pas moins vigoureux :
Telle dame en étoit amplement assurée ;
A telle autre, en une soirée,
Il avoit su donner jusques à dix assauts.
Ah ! pour le coup, notre servante
Ne put pas s'empêcher de s'écrier tout haut :
« Malepeste ! comme il se vante !
Je voudrois, par ma foi, avoir ce qu'il s'en faut. »